"Qu'ils soient parfaitement un" (Jean 17:23)

Taizé : petit village bourguignon de 175 habitants, calme et bucolique. Plutôt classique en somme. Mais il y a plus.

Cette bourgade est surtout connue pour abriter une "Parabole de communauté, signe concret de réconciliation entre chrétiens divisés et entre peuples séparés"

Roger Schutz, alors étudiant en théologie et futur pasteur, en est le fondateur. Dès 1940, pour venir en aide aux réfugiés fuyant de la guerre, il achète une maison à Taizé. Ce village est idéalement situé car tout près de la ligne de démarcation. Roger est obligé de partir momentanément à Genève, de peur d'être découvert. Le retour à Taizé se fait en 1944, accompagné de quelques frères. Ce petit groupe est ensuite rejoint par d'autres hommes et c'est en 1949 que sept frères s'engagent pour la vie dans la communauté. Le rapprochement entre protestants et catholiques a toujours été cher au jeune Schutz. Il côtoie avant la guerre l'abbé Paul Couturier, connu pour avoir oeuvré en faveur de l'unité des chrétiens. Dès le début, Roger Schutz a donc à coeur de lancer la communauté sur le chemin de œcuménisme. C'est ainsi qu'il rédige la règle de Taizé en 1953. Il y décrit "l'essentiel permettant la vie commune", dans une recherche de simplicité, de joie, et d'harmonie.

Dès les années 60, des jeunes affluent de toute l'Europe pour faire une pause dans la communauté. L'église du village devient trop petite et on inaugure en 1962 un nouveau lieu de prière : l'église de la réconciliation. C'est celle qui est encore utilisée.


Aujourd'hui, la communauté compte une centaine de frères, protestants et catholiques, de trente nationalités différentes. C'est le frère Aloïs qui en est le prieur depuis 2005 (date du décès de frère Roger.) "Réconcilier les hommes et les idées, bâtir des ponts, tout en étant signe de contradiction, c'est assurément la vocation de cette communauté œcuménique."*


A mon sens, une présentation faite sous le prisme historique donne une vision parcellaire de ce que peut représenter Taizé pour les jeunes. Je la complète donc par un témoignage. Pour que le billet ne soit pas trop long, je me concentrerai ce qu'ont été pour moi les temps forts.

J'ai eu la chance d'y aller à deux reprises. A chaque fois, j'avais choisi la période de Pâques pour des raisons purement pratiques - je travaillais déjà et je pouvais pas prendre de congés, mais aussi et surtout pour la symbolique de cette date. Se remémorer la mort et la résurrection de Jésus était une manière de revoir les bases de ma foi. Le premier séjour s'est fait à un moment où ma vie étaient tissée de ruptures tant personnelles que professionnelles et j'avais beaucoup d'incertitudes face à l'avenir. Je devais passer trois jours à Taizé avec une arrivée le vendredi après-midi et un départ le lundi. 

J'ai plongé dans cette retraite comme un nageur débutant, avec l'assurance que j'allais vraiment rencontrer mon Seigneur et que nous allions pouvoir enfin discuter en face-en-face. J'avais beaucoup de choses à Lui dire, mais j'ignorais encore que c'est Lui qui me parlerait le plus.

Le vendredi saint, les cloches de la communauté sonnent pour matérialiser le moment de la mort de Jésus. Le "hasard" a fait que ma voiture franchissait les portails exactement au même instant. Cela a donné dès le début le ton d'un séjour : tout allait contribuer à me rapprocher de Dieu.

Après un accueil pour régler les détails logistiques (réservation des repas, informations sur l'emploi du temps, installation de la tente...), mon premier réflexe a été de visiter les lieux, et bien sûr de pénétrer dans l'église de la Réconciliation, vaste bâtiment rempli du souffle de l'Esprit. Ma première impression a été positive. Tout ici invitait à la vie intérieure, à se mettre en mouvement vers notre Créateur, à Le recevoir pleinement. Tout ici suggérait de méditer sur soi et sa vie bien sûr, mais aussi et surtout sur Christ, Son oeuvre, Sa vie, Son amour infini.

La frugalité des repas m'a aidé à reconnaître que malgré les difficultés, je vivais en fait dans l'abondance et c'est le coeur rempli de reconnaissance que je dégustais les quelques cuillerées proposées.

Mais c'est lors des prières communes, trois fois par jour, que le coeur s'ouvre le plus. En peu de mots, les chants disent une vérité fondamentale de l'Evangile, qui est intériorisée rapidement et permet ainsi de s'attendre à Dieu. 

Ils sont entrecoupés de silence, composante fondamentale qui nous ouvre à l'écoute. La prière devient respiration, dans la simplicité d'une relation entre Père et enfant. C'est sans doute ce qui nous aide tous à rester aussi longtemps pour contempler Dieu, Le laisser nous prendre dans Se bras, recevoir Sa paix. Jamais l'adoration n'avait été si évidente pour moi. Lors de la veillée, les heures paraissaient des minutes, et c'est finalement mon corps qui m'a obligé à quitter les lieux en pleine nuit en me rappelant qu'il fallait dormir un peu. 

Dimanche, nous avons vécu la beauté d'une communion par delà les origines et les nationalités. Tous, nous avons annoncé avec joie que Jésus est vivant. L'église brillait de mille feux car chacun et chacune, nous tenions une bougie, symbole de cette espérance. Le monde entier était semble-t-il présent et chacun exprimait dans sa propre langue le fondement de sa foi : à la phrase "Jésus est ressuscité", l'assemblée répondait inlassablement : "oui, il est vraiment ressuscité".  J'avoue avoir été émue par tant d'universalité.

Taizé, parabole d'une communauté. Les frères nous donnent certes un exemple par leur engagement à vie et l'ouverture dont ils font preuve malgré les différences. Mais je le vois surtout avec tous ces jeunes - ados, étudiants, jeunes actifs - qui sont dans la même dynamique. Celle de l'authenticité, de la confiance en soi, en Dieu, en les autres, celle de l'élargissement. Tous, nous cherchons Celui qui nous donne, en tout, la paix du coeur.**


**Titre d'un ouvrage de Frère Roger, qui chaque jour, se propose de nous aider à aller de l'avant à travers quelques paroles simples.

Sources
https://www.taize.fr/fr
*ESCAFFIT JC, RASIWALA Moïz, Histoire de Taizé
http://www.museeprotestant.org/notice/la-communaute-de-taize/ 










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